Daoulas (Finistère)
Vers 1163, le vicomte de Cornouaille capture par ruse son parent Hervé II, vicomte de Léon, et son fils Guyomarch. Hervé II est délivré par son autre fils : Hamon, évêque de Léon. En représailles, le vicomte de Cornouaille et son frère sont séquestrés au château de Daoulas, où on les laisse mourir de faim et de soif. Peu après, en 1171, Guyomarch fait assassiner l’évêque Hamon, favorable à Henri II Plantagenêt, roi d’Angleterre, dont les troupes ont envahi le Léon. Mais le repentir le saisit, deux ans plus tard Guyomarch fonde l’abbaye de Daoulas. Les seigneurs de Léon font de l’abbaye leur nécropole et la dotent jusqu’en 1363. Le relais est alors pris par les Rohan.
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La vie des Augustins est organisée selon le modèle donné par Saint-Augustin (354-430), évêque d’Hippone de 396 à sa mort. Les chanoines ne sont pas moines. Ils forment une communauté rattachée à une abbaye et soumise à l’autorité d’un abbé qu’ils élisent, tout en exerçant des missions d’apostolat (diffusion de l’Évangile) et de prêtrise (célébration de l’eucharistie, pardon des péchés…) auprès de la population qui leur est confiée.
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Dotée de revenus ecclésiastiques et seigneuriaux par ses fondateurs, l’abbaye assure auprès de la population une mission pour laquelle elle touche des revenus confortables. Ceux-ci lui permettent de rénover l’ensemble des bâtiments après les destructions de la guerre de Cent Ans.
24 à 26 abbés réguliers se succèdent jusqu’en 1598, date de la mise en commende de l’abbaye. Pendant quatre siècles, l’abbaye, malgré les vicissitudes au moment de la guerre de Cent Ans, s’enrichit considérablement et étend sa notoriété bien au-delà des paroisses dont elle a la charge. |
Les bâtiments romans de l’abbaye de Daoulas souffrent pendant la guerre de Cent ans (1377-1453). Les successeurs de l’abbé Guérault, tenus de reconstruire les bâtiments endommagés, semblent avoir mené une série de travaux d’envergure qui transforment progressivement la sobre abbatiale romane en resplendissante église gothique. |
La mise en commende de l’abbaye marque le début d’un long déclin. Au cours du XVIIe siècle, trois nobles occupent la fonction d’abbé commendataire, avec une évolution qui dénote des relations de plus en plus difficiles entre l’abbé et les chanoines et l’importance grandissante des questions d’argent dans les conflits. |
Louis XIV fait don de l’abbaye au séminaire jésuite de Brest en avril 1692 : la fonction d’abbé disparait. Les deux menses, abbatiale et conventuelle, seront dorénavant perçues par les jésuites. Les chanoines seront remplacés, à leur mort, par des jésuites. Ces derniers n’assurent pas plus la formation d’aumôniers que l’entretien de l’abbaye. En 1715, les bâtiments sont en piteux état. Les jésuites, englués dans les frais, sont incapables de procéder aux travaux nécessaires. Les chanoines, également endettés, ne peuvent non plus y faire face. L’abbaye, au XVIIIe siècle, est donc en très mauvaise situation financière et en déliquescence interne. Elle n’attire plus les vocations, ni les donations. L’abbaye est désormais gérée par les Économats, une institution ecclésiastique qui gère notamment les droits des évêchés et abbayes vacants.
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De 1765 à 1774, l’Économat fait établir plusieurs devis de réparation. En quelques années, des sommes énormes (plus de six ans de revenus de l’abbaye) sont engagées. La Révolution bouleverse tous ces plans de remise en état et la foudre, qui frappe le clocher le 22 novembre 1790, ruine le grand chœur gothique de l’abbatiale.
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En 1790, deux chanoines vivent à l’abbaye et six dans une cure. Aucun d’entre eux ne choisit de quitter la vie religieuse. Avant la fin de l’année 1790, les chanoines quittent les lieux. Les dépendances sont vendues essentiellement en 1791 et 1792. L’église est dévolue à la commune. Les bâtiments monastiques sont vendus le 12 juillet 1792. |
De 1792 à 1984, cinq familles et une congrégation religieuse se succèdent dans l’ancienne abbaye, avant que le Conseil général (aujourd’hui Conseil départemental) du Finistère ne l’acquière et ne l’ouvre au public. Démantèlements et restaurations alternent ainsi au cours des XIXe et XXe siècles. Église néo-romane, cloître reconstitué, jardin de plantes médicinales créé de toutes pièces, tel qu’il est devenu, le site témoigne d’intentions successives et sincères pour restituer aux générations suivantes l’intérêt du lieu, sa grandeur et sa beauté.